Dans le but de réduire la déductibilité des frais d’intérêts et de financement excessifs, le ministère des Finances a dévoilé la version finale de la loi le 20 juin 2024, marquant une étape importante dans le paysage fiscal canadien. Pour mieux comprendre l’évolution des règles de restriction des dépenses excessives d’intérêts et de financement (« RDEIF »), veuillez consulter les publications précédentes de BDO traitant des propositions initiales et des mises à jour de celles-ci.
Évolution des règles de RDEIF : Partie II
Découvrez les questions liées à la modélisation en fonction des règles de RDEIF touchant aux pertes en capital et autres qu’en capital.
En savoir plusÉvolution des règles de RDEIF : Partie III
Le troisième article de cette série traite de la position du contribuable à l’égard des règles de RDEIF.
En savoir plusÉvolution des règles de RDEIF : Partie IV
La dernière partie de notre série d’articles aborde les récentes mises à jour des règles de RDEIF.
En savoir plusContexte et application des règles du régime de RDEIF
Les règles de restriction des dépenses excessives d’intérêts et de financement (« RDEIF ») sont conçues pour refléter les recommandations de l’Action 4 présentées dans le cadre du projet de l’Organisation de coopération et de développement économiques (« OCDE ») sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, aussi appelé l’Action 4 du Plan d’action concernant le BEPS.
Les règles de RDEIF limitent la déductibilité des dépenses nettes d’intérêts et de financement en plafonnant les dépenses admissibles à un ratio fixe de 30 % du revenu imposable rajusté. En vertu de ces règles, la portion inutilisée des dépenses d’intérêts est reportée pour que le contribuable puisse la déduire d’un revenu imposable futur.
Pour pouvoir s’y retrouver, il est essentiel que les entreprises et les professionnels en fiscalité comprennent la portée et les répercussions des règles de RDEIF. Le but de ce premier article d’une série en quatre volets est d’analyser en détail les principales différences entre les propositions initiales et le projet de loi définitif. Chacun des articles de cette série couvrira un domaine technique précis et abordera les enjeux et questions dont il faut tenir compte.

Partie I – Mère ultime
Les règles fiscales transfrontalières posent souvent des difficultés aux sociétés multinationales. Les règles de RDEIF viennent complexifier le concept de déductibilité des intérêts tel qu’on le connaissait déjà. Si la règle du ratio fixe a été largement abordée dans des notes explicatives et des articles, la règle du ratio de groupe et les possibilités qu’elle offre aux structures de capital-investissement n’ont pas reçu autant d’attention.
Le ratio fixe de groupe est souvent choisi pour tirer parti de la structure financière d’un groupe international, plus particulièrement lorsqu’une partie prenante a une dette importante contractée à l’extérieur du Canada ou que le BAIIA consolidé du groupe est relativement faible. Le cas échéant, l’entité canadienne peut bénéficier d’une déduction d’intérêts supérieure au ratio fixe de 30 %.
Pour pouvoir utiliser ce droit de déduction élevée, la mère ultime du groupe international doit produire des états financiers consolidés audités. Selon les règles de RDEIF, la mère ultime s’entend d’une entité au sein de laquelle aucune autre entité ne détient directement ou indirectement de participation et qui est tenue de préparer des états financiers consolidés ou qui le serait si elle était assujettie aux normes internationales d’information financière. Les notes explicatives actuelles ne contiennent pas suffisamment d’exemples exhaustifs de la détermination d’une mère ultime au sein d’une structure organisationnelle courante comme le capital-investissement.
Dans le contexte du capital-investissement, une analyse approfondie permet d’obtenir de précieuses informations. En général, la structure des groupes de capital-investissement comporte une hiérarchie complexe et des placements dans différentes entités. Prenons une structure de groupe de capital-investissement type :
Dans le cas où un fonds de placement serait tenu, comme la mère ultime, de préparer des états financiers consolidés conformément aux Normes internationales d’information financière (« IFRS »), il est peu probable que le fonds de placement envisagerait de faire le choix du ratio de groupe. La préparation d’états financiers consolidés audités par le fonds de placement, ou par sa société mère, engendrerait des coûts importants associés à la coordination de la conformité, de l’échéancier et de l’équipe.
Le concept de mère ultime en vertu des règles de RDEIF et celui proposé selon le pilier 2 de la Loi de l’impôt minimum mondial sont très similaires sur le plan de l’application. Les deux référentiels mettent l’accent sur la détermination des entités détenant une participation donnant le contrôle, ce qui correspond aux principes comptables régissant la préparation d’états financiers consolidés.
Les IFRS comportent des exemptions qui permettent à certaines entités de placement de contourner les exigences de consolidation. La détermination de la mère ultime au sein des structures de capital-investissement soulève donc des questions. En partant du principe que la Société de personnes Can satisfait la définition d’une entité d'investissement, la société canadienne relevant directement de la société de personnes prend-elle la désignation de mère ultime? Une telle interprétation permettrait aux sociétés de portefeuille des fonds de capital-investissement de choisir le ratio de groupe sans être indûment pénalisées selon le libellé des dispositions législatives actuelles.
Il est donc essentiel d’avoir une vision globale des structures financières mondiales, des cadres réglementaires et de l’évolution des lois fiscales internationales pour comprendre les avantages fiscaux des entités admissibles d’un groupe canadien. Le choix stratégique du ratio de groupe, notamment dans certains secteurs spécialisés comme celui du capital-investissement, pourrait conférer à des entités d’importants avantages sans nuire à leur conformité aux exigences législatives.
Principaux éléments à retenir et prochaines étapes
L’application des règles du ratio de groupe peut augmenter la capacité de déduction d’intérêts lorsqu’une autre mère ultime peut être établie, particulièrement au sein de structures complexes comme celles des fonds de capital-investissement. Fait à noter, les principes comptables pourraient être utilisés dans la détermination de la mère ultime. Voici des éléments dont vous devez tenir compte pour la suite :
- Revoyez l’ensemble du groupe pour déterminer si celui-ci a contracté, ou prévoit contracter, une dette importante auprès de tiers situés à l’extérieur du Canada, ou si le BAIIA consolidé du groupe canadien est réduit par celui du groupe international;
- Analysez la structure du groupe dans son ensemble en fonction des IFRS pour cibler les entités qui pourraient être considérées comme la mère ultime et celles qui pourraient être considérées comme des entités d’investissement;
- Songez à consulter un spécialiste des IFRS pour les structures de capital-investissement, car la détermination de l’entité mère ultime peut s’avérer complexe dans leur cas;
- Simulez l’incidence du régime de RDEIF selon les règles de ratio fixe et selon celles du ratio de groupe pour déterminer quelle méthode offre une plus grande capacité de déduction d’intérêts. Gardez en tête que le choix du ratio de groupe peut être fait annuellement. Ainsi, si la méthode du ratio fixe offre une plus grande capacité de déduction d’intérêts pour une période d’imposition donnée, il n’est pas nécessaire d’opter pour la méthode du ratio de groupe.
Communiquez avec votre conseiller de BDO pour savoir comment nous pouvons vous aider à gérer l’incidence de ces propositions sur votre entreprise.
Harry Chana,
Chef des Services en fiscalité internationale et transfrontalière
Jaskirit Randhawa,
Directeur principal, Services en fiscalité internationale
1Les règles transitoires permettent une déduction à un ratio fixe de 40 % du revenu imposable rajusté pour les périodes d’imposition qui commencent le 1er octobre 2023 et se terminent le 31 décembre 2023.
L’information présentée est à jour en date du 16 avril 2025.
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