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Mobiliser des capitaux sur des marchés difficiles

Jeffrey Stanger :

Parfois, l'argent facilement gagné peut entraîner un échec à long terme pour les entreprises, surtout dans certains nouveaux secteurs qui ont émergé au cours des dernières années. Celles qui mobilisent des capitaux en périodes difficiles, comme présentement, doivent se pencher davantage sur leur modèle d'affaires et le marché pour obtenir des informations à la fois précises et à jour.

Narrateur :

Bienvenue à La comptabilité de l'avenir, un balado de BDO Canada à l'intention des dirigeants financiers qui doivent composer avec le changement et faire croître les affaires. Nous y dévoilerons les défis que les dirigeants financiers pourraient ne pas avoir relevés, mais qu'ils devront absolument gérer à l'avenir.

Armand Capisciolto :

Bonjour et bienvenue à La comptabilité de l'avenir. Je m'appelle Armand Capisciolto et je suis associé au sein du Service national des normes comptables et chef des Services-conseils en comptabilité de BDO Canada. Dans l'épisode d'aujourd'hui, j'accueille Jeffrey Stanger. Jeffrey a travaillé pour des sociétés ouvertes et fermées pendant de nombreuses années. Plus récemment, il a cofondé ITB Solutions, où il enseigne la façon d'accéder aux marchés financiers à l'aide de courtiers en valeurs mobilières inscrits. Jeffrey, bienvenue à La comptabilité de l'avenir.

Jeffrey Stanger :

Merci de m'avoir invité. J'attendais ce moment avec impatience. Il s'agit d'un sujet très pertinent dans le contexte actuel et il sera intéressant d'en discuter.

Armand Capisciolto :

Oui, nous traversons actuellement une période très particulière. Je crois que quiconque a fourni des conseils à des entreprises sur les marchés financiers est au fait que les années 2020 et 2021 ont été très chargées, même si nous étions en période de pandémie. Les marchés financiers ont été très actifs. Des entreprises se sont introduites en bourse et ont mobilisé des capitaux supplémentaires sur les marchés publics. Ces années ont été très enrichissantes. Jusqu'à maintenant, 2022 a été légèrement différente.

Des changements se produisent au quotidien, mais, pendant un certain temps, nous étions un peu comme en période de marché baissier. C'est peut-être toujours le cas; l'inflation et les taux d'intérêt sont en hausse. Selon la personne à qui vous le demandez, nous sommes en période de récession ou possiblement sur le point de l'être. Impossible de savoir combien de temps cela va durer. Nous avons tous observé un ralentissement des activités sur les marchés publics.

Jeffrey, vous travaillez avec beaucoup d'entreprises en phase de démarrage et celles-ci ne se contentent pas de faire un seul appel public à l'épargne. Elles doivent régulièrement émettre des actions pour prendre de l'expansion. Comment les entreprises avec lesquelles vous travaillez composent-elles avec ce que j'appelle des marchés financiers plus restrictifs?

Jeffrey Stanger :

D'abord, voici un aperçu de mon parcours. J'ai travaillé pendant 16 ans dans deux des bourses canadiennes les plus reconnues en matière de cotations. J'ai vu de tout. Je suis dans le domaine depuis 28 ans, j'ai travaillé dans le secteur de l'exploitation minière de l'or lorsque Bre-X s'est révélée une entreprise frauduleuse pendant la bulle technologique du début des années 2000, lors du krach de 2008-2009. Je sais donc qu'en période difficile, il est quand même possible de mobiliser des capitaux. Il faut tout simplement beaucoup de travail et un vaste public.

C'est aussi très avantageux pour les petites entreprises que le Canada soit doté d'un petit marché financier robuste et d'investisseurs qui le comprennent bien. Il a été facile de mobiliser des capitaux au cours de la dernière décennie et, d'une manière, c'est malheureux, car le marché actuel met à l'épreuve la gestion des entreprises et montre véritablement de quoi elles sont faites. Lorsque les liquidités ont été épuisées dans certains secteurs, notamment dans celui du cannabis, les entreprises ne savaient plus vers qui se tourner pour mobiliser des capitaux. Les débuts dans un marché difficile ne peuvent que simplifier ce que l'avenir nous réserve.

Armand Capisciolto :

Vous soulevez quelques points très intéressants. Vous avez mentionné que vous travaillez dans ce secteur depuis les 28 dernières années. Bien que nous entendions parler du taux d'inflation global inégalé depuis 40 ans, nous avons dû composer avec de récentes perturbations sur le marché, ce qui fait que la situation actuelle ne nous est pas complètement étrangère.

D'autre part, il est très intéressant que vous parliez des entreprises en période difficile lors de leur démarrage et du fait qu'elles en bénéficient à long terme. J'aimerais vraiment en savoir plus sur ce que vous entendez par les entreprises qui doivent faire leurs preuves sur le marché. Ce concept me plaît énormément. Je me demande ce que les entreprises peuvent prévoir pour se démarquer lorsque viendra le moment de mobiliser des capitaux.

Jeffrey Stanger :

Premièrement, la préparation est essentielle. Les entreprises doivent être prêtes lorsqu'elles rencontrent des investisseurs. Elles ne doivent pas emballer leur parachute après avoir sauté de l'avion. En ce sens, elles doivent préparer leur présentation. Bien entendu, il est essentiel d'avoir un modèle d'affaires et de revenus historiques, si possible, ainsi que des prévisions financières

pour lesquelles elles devront émettre des hypothèses détaillées à vérifier. Ces renseignements n'ont pas à faire partie de la présentation. Ils servent à titre de référence et peuvent être contenus dans une annexe à la présentation ou autre. Comme nous le savons tous, les prévisions financières ne se réalisent jamais. Des études ont d'ailleurs été menées à l'Université Stanford sur les entreprises en démarrage et leurs prévisions financières. Toutefois, ces prévisions doivent permettre aux investisseurs avertis de voir que les entreprises comprennent l'ensemble du marché disponible et leurs dépenses. Cela dit, les dépenses peuvent poser un énorme problème. Nous souhaitons tous qu'elles demeurent minimales. « Je peux me passer de ceci ou cela », diront-elles, mais même si les entreprises ont des dépenses raisonnables, elles seront plus élevées que prévu à l'avenir.

Les investisseurs avertis comprennent que les entreprises en démarrage ne feront pas des bénéfices une priorité au cours de la première année. Ils le comprennent bien, car ils investissent à long terme. Or, ces entreprises doivent tout de même s'assurer de leur expliquer qu'elles comprennent bien leur marché. Elles doivent évaluer l'ensemble du marché disponible, c'est-à-dire la part de marché qu'elles peuvent obtenir, puis justifier l'utilisation de leurs produits en fonction de leurs objectifs, plutôt que simplement l'énoncer : « Notre fonds de roulement sera de 65 %. » Pourquoi une entreprise en démarrage fonctionnerait-elle de la sorte? Elle souhaite que son argent soit mis à profit. Il est donc important de le souligner.

Armand Capisciolto :

Voilà qui est intéressant. Vous avez parlé de prévisions et de l'importance de montrer aux investisseurs que l'on comprend bien sa part du marché et l'ensemble de celui-ci. Comme vous l'avez dit plus tôt, mobiliser des capitaux en période difficile prépare bien les entreprises pour l'avenir, car je présume que dans une telle situation les investisseurs posent des questions plus pointues à propos de leurs prévisions et du marché. Elles doivent donc être mieux préparées, ce qui présente un avantage bien au-delà de la mobilisation initiale. Cet avantage s'étend même au moment de leur entrée en activité.

Jeffrey Stanger :

Oui, tout à fait. Un autre aspect négligé par de nombreuses entreprises concerne la préparation de la salle d'information pour le processus de contrôle diligent, ce qui demande un certain effort. Lorsqu'un investisseur est intéressé et qu'il désire voir la salle d'information d'une entreprise et ses dépenses, on entend souvent « Oh, je pourrai y arriver en quelques jours ». En réalité, il faudra probablement de trois semaines à un mois pour le faire. Cet investisseur pourrait alors préférer conclure une autre transaction, parce qu'il ne considère pas seulement cette entreprise. Plusieurs options s'offrent à lui. Une nouvelle affaire se présente chaque instant. Il est donc très important de mettre en place cette salle d'information pour le processus de contrôle diligent.

Les entreprises doivent effectuer les démarches nécessaires auprès de leur éventuel auditeur et ne doivent surtout pas se présenter avec une boîte remplie de reçus. L'un des cofondateurs de Wave, une application de comptabilité en ligne, et moi avons écrit sur mon site Web, gopublicincanada.com, un article intitulé « Financial Foresight: Get the Accounting Right, Right Now » à propos de l'importance d'être bien préparé. Inspirez-vous-en pour connaître toute l'information qui doit être fournie aux investisseurs, même si vous n'avez aucun produit et que des dépenses. Cela facilite les choses.

Armand Capisciolto :

Quelle bonne idée, Jeffrey! C'est un sujet que nous abordons constamment avec les entreprises avec lesquelles nous travaillons et les associés de BDO. Les entreprises doivent anticiper leur désir d'accéder aux marchés publics. Encore une fois, je suis un homme de principes comptables généralement reconnus (« PCGR »). J'adore parler des PCGR. Je pose toujours la question suivante : « Pourquoi n'appliquez-vous pas les normes IFRS dès maintenant si votre objectif consiste à entrer en bourse dans trois ans? Faites de l'ordre dans vos finances avant de conclure une entente, car ce n'est pas chose facile et cela vous demandera du temps. »

Malheureusement, j'ai vu des transactions échouer parce que des entreprises n'avaient pas pu produire d'états financiers ou effectuer un audit en temps opportun pour les investisseurs intéressés. Ce sont donc de très bons conseils qui me plaisent. Il faut assurer l'exactitude de la comptabilité, dès maintenant.

Vous avez aussi parlé d'élargir son public. Dans un marché comme celui-ci par rapport à ce que nous avons connu ces deux dernières années, parle-t-on d'un public différent? Pouvez-vous préciser?

Jeffrey Stanger :

Les entreprises devront consulter beaucoup plus de gens parmi leurs contacts pour trouver de bons investisseurs ou des investisseurs avertis. Je parle ici de courtiers en valeurs mobilières ou autres qui ont une bonne compréhension du marché. Les courtiers en valeurs mobilières connaissent des investisseurs expérimentés et avisés qui pourraient agir à titre de chefs de file de consortium de financement. Leur participation augmenterait ainsi leurs chances d'attirer d'autres investisseurs.

Toutefois, pour trouver un investisseur, ces entreprises doivent s'adresser à plusieurs sociétés inscrites ou sociétés membres de l'OCRCVM, et celles-ci feront preuve de prudence. Ainsi, ce que nous avons mentionné précédemment concernant la préparation leur sera très utile. Par ailleurs, beaucoup d'entreprises se préoccupent de leur dilution à long terme et continueront de l'être pour la suite des choses. Ayant participé à de nombreuses introductions en bourse au cours des 16 dernières années, j'ai pu observer que tout est une question d'équilibre.

Certaines entreprises s'en font à outrance à propos de leur dilution et nuisent ainsi à leur avenir. L'un de mes mentors, un spécialiste en placements inscrit ayant collaboré au financement de plus de sept cents entreprises, disait que « si les canards cancanent, il faut les nourrir ». Autrement dit, si les investisseurs veulent investir, laissez-les faire. Il ne faut pas trop s'attarder à la dilution au point de nuire à l'obtention de capitaux, car ils sont essentiels à l'atteinte des objectifs.

De plus, nul ne peut prédire l'avenir. De nombreuses entreprises qui ne s'étaient pas souciées de préserver leurs capitaux s'attendaient à ce que le marché soit très favorable. À la fin de la pandémie, il était aisément possible d'obtenir des fonds. Par contre, avant le krach de 2008-2009, trop d'entreprises se souciaient de leur dilution et se disaient « Oh, je ne vais mobiliser que 500 000 $ de capitaux au prix courant, les faire fructifier, puis mes actions ou mon entreprise prendront de la valeur et je serai en mesure de solliciter des investissements supplémentaires plus tard. » Le krach est survenu et elles n'ont pas survécu, car elles n'ont pas pu mobiliser de capitaux.

Il est donc très important de comprendre que la dilution est une question d'équilibre. L'an dernier, lorsque le marché se portait bien, de nombreuses entreprises étaient préoccupées et se disaient : « Oh, je vais attendre. Je ne vais mobiliser qu'une petite somme d'argent. » Maintenant, ces entreprises doivent émettre plus d'actions pour mobiliser autant de capitaux et ne tiennent plus compte des répercussions de la dilution.

Armand Capisciolto :

Exactement. Tout d'abord, j'aime vraiment l'expression « Si les canards cancanent, il faut les nourrir. » Il se peut que je m'en serve à l'occasion. La question de la dilution est toutefois très intéressante. Lorsqu'une entreprise, et surtout son conseil d'administration, envisage de mobiliser des capitaux, elle doit tenir compte des besoins des investisseurs actuels. Elle ne peut pas ignorer ces besoins. Vous avez donné un excellent exemple :

Une entreprise qui s'inquiétait de sa dilution aurait pu émettre ses actions à un certain prix. Or, lorsque le marché chute comme il l'a fait et que cette entreprise est en phase de démarrage, que ce soit dans le secteur des technologies ou de la biotechnologie, des fonds sont tout de même nécessaires pour poursuivre ses activités et ses recherches. Ses actions ont perdu la moitié de leur valeur, mais elle a vraiment besoin de capitaux, sinon elle ne sera plus en mesure de faire avancer ses projets. Elle dilue donc encore plus ses capitaux propres. Le fait de ne pas être en mesure de prédire l'avenir et ce qui s'est passé au cours des six derniers mois rappellent à bien des gens que le marché n'est pas toujours en hausse. C'est ce qui arrive. Nous aimons croire que ce sera toujours pour le meilleur et nous avons tous espoir-

Jeffrey Stanger :

Nous avons espoir.

Armand Capisciolto :

… Nous espérons qu'il en sera ainsi.

Jeffrey Stanger :

Oui.

Armand Capisciolto :

Mais ce n'est pas toujours le cas. Revenons à ce que vous avez mentionné au début, lorsque vous parliez de ce dont vous avez été témoin au cours de votre carrière. Plusieurs facteurs peuvent avoir une incidence négative sur les marchés.

Jeffrey Stanger :

Oui, puis l'émission d'actions se fait à des prix beaucoup plus bas et tout le monde est mécontent, surtout les gens qui ont investi au début. Les entreprises procèdent ensuite à une consolidation ou, comme d'autres personnes l'appellent, à un regroupement d'actions, et cela ne fonctionne pas non plus.

Armand Capisciolto :

Oui. Très pertinent. Beaucoup de points intéressants. Avez-vous autre chose à ajouter?

Jeffrey Stanger :

Parfois, l'argent facilement gagné peut entraîner un échec à long terme pour les entreprises, surtout dans certains nouveaux secteurs qui ont émergé au cours des dernières années. Celles qui mobilisent des capitaux en périodes difficiles, comme présentement, doivent se pencher davantage sur leur modèle d'affaires et le marché pour obtenir des informations à la fois précises et à jour, et ainsi découvrir d'autres occasions et d'éventuelles embûches à surveiller.

Cette semaine, nous avons mené une enquête plus approfondie sur le marché d'un client que ce qu'il avait fait précédemment, et celui-ci a découvert une source de revenus supplémentaires pour ses services, en plus de les renforcer par rapport à sa cible initiale. Il était très heureux, et cela ne fait qu'améliorer la situation.

Armand Capisciolto :

C'est une belle histoire. Lorsque je vous ai parlé de la façon de mobiliser des capitaux dans un marché difficile, vous m'avez dit « D'accord, parlons des vraies choses ». Je crois cependant que je voyais le verre à moitié vide. Ce que vous nous avez expliqué consiste plutôt à voir le verre à moitié plein, car si l'on souhaite mobiliser des capitaux dans un marché difficile, ce qui est tout à fait possible, et que l'on fait ce qu'il faut pour y arriver, plusieurs avantages pourront en découler.

Jeffrey Stanger :

Oui. Trop de gens se disent tout simplement « C'est impossible, je laisse tomber. » Certaines personnes sont quand même toujours à la recherche d'occasions et cela permet de s'améliorer.

Armand Capisciolto :

Oui, c'est une excellente façon de conclure la discussion. Jeffrey, merci pour vos éclaircissements sur le sujet. Notre auditoire et moi-même vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de nous faire part de votre expertise. J'aimerais remercier nos auditeurs de nous avoir écoutés aujourd'hui. Je suis Armand Capisciolto, et c'était La comptabilité de l'avenir de BDO. N'hésitez pas à nous faire savoir si vous avez trouvé le sujet intéressant et utile, et n'oubliez pas de vous abonner si vous l'avez aimé. En attendant, je vous dis à la prochaine fois!

Narrateur :

Merci d'avoir été ses nôtres pour cet épisode de La comptabilité de l'avenir. Vous pouvez écouter les épisodes précédents et lire d'autres articles sur le sujet au www.bdo.ca/accountingforthefuture. Vous pouvez également utiliser les balados Apple ou Spotify, ou encore les balados Google pour vous y abonner. Pour obtenir de plus amples renseignements sur BDO Canada, visitez le www.BDO.ca.

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