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Combler l’écart entre les genres dans le financement des entreprises du secteur des technologies

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Les femmes entrepreneures du Canada vivent une période stimulante.

La Banque de développement du Canada investit 200 millions de dollars dans les entreprises technologiques dirigées par des femmes, par l'entremise de son Fonds pour les femmes en technologie. Le fonds de capital de risque (« CR ») Disruption Ventures est tourné vers les jeunes entreprises dirigées par des femmes. Le fonds StandUp Ventures, quant à lui, n'investit que dans les entreprises dirigées par des femmes, principalement dans le secteur des technologies.

Les femmes entrepreneures dirigeant des entreprises technologiques subissent encore des inégalités systémiques à la mobilisation des capitaux. Pourtant, les recherches démontrent que les investissements dans des entreprises comptant au moins une femme parmi leurs fondateurs obtenaient un rendement supérieur de 63 % à ceux faits dans des entreprises fondées uniquement par des hommes.

Pour vous aider à franchir les obstacles, nous nous sommes entretenus avec quatre initiées du secteur, des fondatrices et des bailleuses de fonds, qui nous ont parlé de leur expérience et donné des conseils pratiques :

Associée directrice chez Brightspark Ventures. Sophie a reçu le prix Angel of the Year de la NACO en 2017.

Chef des technologies émergentes de la RGT de BDO Canada. Katie est aussi associée en fiscalité au sein des Services aux clients du secteur privé du cabinet.

Fondatrice et présidente-directrice générale de Healthy Pets. Emma a participé à la 12e saison de l'émission Dragons' Den, diffusée sur CBC, où elle a présenté son entreprise devant un groupe d'investisseurs, dont Arlene Dickinson, à la tête de District Ventures Capital, qui lui a consenti un investissement de 500 000 $.

Directrice générale et responsable de la conformité chez Maple Leaf Angels Corporation, réseau d'investisseurs providentiels basé à Toronto qui met en relation des investisseurs providentiels et des entrepreneurs du secteur des technologies.

Silicon Valley, nous avons un problème

Si les statistiques exactes sur le financement des entreprises technologiques au Canada ne sont pas disponibles, les chiffres auxquels nous avons accès font ressortir un problème.

Selon les données de Pitchbook, dans la première moitié de 2018, seuls 12,5 % de la totalité du capital de risque investi ont été injectés dans des entreprises comptant au moins une femme parmi leurs fondateurs. Ce chiffre fait suite à celui, désormais célèbre, de 2017, selon lequel seuls 2,2 % de tous les fonds de capital de risque ont été investis dans des entreprises fondées uniquement par des femmes.

« C'est un véritable problème, et pas seulement sur le plan de l'équité », indique Katie Kaplan. « Les innovations qui stimulent la productivité sont essentielles au succès de l'économie canadienne à long terme. Comme nous évoluons de plus en plus sur le marché mondial, nous devons être à l'écoute des meilleures idées provenant de tous les segments de notre population canadienne diversifiée. »

Les explications sur l'écart observé dans le financement sont nombreuses, mais les observateurs pointent souvent les choix que font les bailleurs de fonds. Seuls 14 % des associés des fonds de CR canadiens sont des femmes, d'après un rapport (en anglais) de Female Funders. Les hommes investisseurs semblent plus enclins à faire confiance aux hommes fondateurs.

« L'écart s'explique en partie par les préjugés naturels envers les femmes entrepreneures, comme la plupart des fonds de capital de risque sont investis par des hommes », dit Sophie Forest, qui, pour la plus grande partie de sa carrière, a été la seule femme à siéger au conseil d'administration.

La question de la vie de famille

Les préjugés auxquels les femmes entrepreneures du secteur des technologies sont exposées passent souvent inaperçus. Ils se manifestent parfois de façon subtile (en anglais) : on interroge les hommes sur les possibilités de gains, tandis que les femmes sont plutôt questionnées sur les possibilités de pertes.

Comment les femmes peuvent-elles réagir aux rares questions qui mettent de l'avant l'enjeu du genre?

« Sur 500 questions que l'on m'a posées, environ 10 ou 15 se rapportaient à mon genre », explique Emma Harris. « De plus, elles étaient toujours injustifiées, car elles se rapportaient à la chronologie de mes objectifs personnels, par exemple le moment où j'allais me marier ou avoir des enfants et le moment où l'entreprise en subirait les conséquences.

Il est probablement préférable de ne pas vous associer avec des investisseurs qui posent ce genre de questions », ajoute-t-elle. Elle conseille néanmoins de garder son sang-froid.

« La meilleure stratégie est de leur répondre le plus professionnellement possible, tout en soulignant le fait que la question n'est absolument pas pertinente dans le contexte de vos affaires. Restez professionnelle, mais il n'y a rien de mal à indiquer qu'une question n'a pas sa place. »

« Les femmes entrepreneures doivent aller à ces rendez-vous en croyant en ce qu'elles font et en démontrant avec confiance ce qu'elles peuvent réaliser avec leur entreprise. »
SOPHIE FOREST, Associée directrice chez Brightspark Ventures

L'écart en matière de confiance

S'il y a un trait de personnalité qui distingue les entrepreneurs, c'est bien la confiance. Ou plutôt, la trop grande confiance une étude (en anglais) portant sur des entrepreneurs américains a révélé que le tiers d'entre eux évaluaient leurs chances de réussite à 100 %.

Pour les femmes entrepreneures, le défi est souvent inverse : elles sont trop modestes par manque de confiance.

« Nous avons tendance à ne pas crier notre succès sur tous les toits », indique Katie Kaplan. « Beaucoup d'investisseurs de CR que j'ai rencontrés soutiennent de jeunes entreprises dirigées par des femmes – le problème est que rares sont celles qui se présentent en se vantant d'être géniales. »

Les théories sont nombreuses pour expliquer ce phénomène. Certains ont pointé du doigt les rôles historiques au sein de la société, qui ont conditionné les hommes à exprimer leur confiance et les femmes, à chercher l'approbation. D'autres observateurs ont mis en cause le climat de financement lui-même. À leur avis, il n'est pas étonnant que les femmes soient moins confiantes, vu le traitement empreint de préjugés qui leur est réservé et le peu de femmes investisseuses.

Les insécurités peuvent se manifester de manières surprenantes lors d'une présentation importante.

« Il arrive que, dans leur présentation, les femmes parlent des enjeux associés au genre », indique Prathna Ramesh. « Il s'agit, bien sûr, d'un aspect important de leur histoire, mais j'ai constaté que trop le faire ressortir peut nuire à l'essence de la présentation, qui devrait uniquement porter sur leur entreprise. »

Pour Emma Harris, de Healthy Pets, le manque de confiance a nui à son objectif de financement.

« Les hommes fixent généralement des objectifs plus ambitieux que les femmes », explique-t-elle. « Je l'observe non seulement par rapport au montant du financement, mais aussi à son utilisation. J'ai participé à l'émission Dragon's Den pour demander un investissement ridiculement bas, mais une aventure comme celle-là coûte cher, alors un montant aussi peu élevé aurait, à terme, tué mon entreprise. »

Dans tous les cas, les entrepreneures à la tête d'entreprises du secteur des technologies doivent se rappeler que la première impression compte. Comme le veut le dicton, les investisseurs financent des gens, pas des idées.

« La première impression que vous laisserez déterminera si vous aurez un deuxième rendez-vous ou non », selon Sophie Forest. « Si vous êtes compétente et que vous obtenez ce deuxième rendez-vous, vous avez des chances d'attirer un investissement. Mais si vous ne pouvez faire valoir vos compétences lors du premier rendez-vous, vous n'irez nulle part. Les femmes entrepreneures doivent aller à ces rendez-vous en croyant en ce qu'elles font et en démontrant avec confiance ce qu'elles peuvent réaliser avec leur entreprise. »

L'importance des relations

Le processus de présentation fait l'objet d'une attention particulière des entrepreneurs, et ce, pour une bonne raison. Les vétérans du secteur disent toutefois que les fondateurs gagneraient également à nouer des relations avec les bailleurs de fonds à l'extérieur de la salle de conférence.

« Il est très important de trouver un mentor et un spécialiste en mesure de nous aider à nous y retrouver dans cet environnement », affirme Prathna Ramesh. « C'est, depuis longtemps, un club sélect d'hommes âgés, alors il vous sera utile de trouver quelqu'un qui vous y invitera. Il faut voir l'ensemble du processus de financement comme une relation et non comme une transaction. »

Au moment de nouer ces relations, les entrepreneurs oublient parfois une pratique exemplaire qui les a conduits à leur succès initial : faire preuve de persévérance.

« Il y a tant d'entrepreneurs qui viennent nous voir, nous envoient un courriel, nous laissent un message, mais qui ne font aucun suivi », explique Sophie Forest. Vous savez, peut-être aurais-je été intéressée par leur entreprise, mais je reçois de 10 à 15 plans d'affaires tous les jours. Peut-être étais-je très occupée ce jour-là, ce qui fait que je n'ai pas lu leur courriel ou que j'ai oublié d'y répondre. Cela ne signifie pas que je ne suis pas intéressée. »

Pour les entrepreneures du secteur des technologies comme Emma Harris, la visibilité accrue de femmes comme Michelle Romanow et Arlene Dickinson, qui sont toutes les deux passées par l'émission Dragon's Den, a fait émerger de nouveaux modèles.

Mais Emma Harris décrit également sa relation avec Damien Steel, associé directeur chez OMERS Ventures, comme indispensable à sa réussite. Elle a tendance à solliciter ses réseaux principalement féminins pour des enjeux qui concernent les femmes, par exemple l'équilibre entre la vie personnelle (mariage, maternité) et l'entrepreneuriat.

Évitez de suranalyser les choses

La génération actuelle d'entrepreneures du secteur des technologies est confrontée à un étrange exercice d'équilibre.

Celles-ci ne peuvent prétendre qu'elles ne se heurtent pas à des obstacles institutionnels en tant que femmes. En fait, comme pionnières sur le terrain, ce sont elles qui sont les mieux placées pour les constater et en parler. En même temps, les fondatrices d'entreprises savent que le succès est intimement lié à une attitude positive.

C'est une question de point de vue, disent les spécialistes du secteur.

« Oui, c'est parfois plus difficile pour les femmes », dit Sophie Forest, « mais cela ne doit pas les empêcher de tenter leur chance. Faire les choses différemment sous prétexte que vous êtes une femme ne vous mènera nulle part. En tant que fondatrice, vous bâtirez une entreprise incroyable et vous préparerez une analyse de rentabilité convaincante. C'est peut-être plus exigeant, mais n'oubliez pas que le financement est difficile pour tout le monde. »

Dans l'attente d'un changement?

Les femmes devraient profiter des fonds et des programmes qui soutiennent les jeunes entreprises technologiques dirigées par des femmes, selon Katie Kaplan. Il faut les considérer comme faisant partie de la stratégie globale de financement de l'entreprise.

En plaçant des femmes talentueuses sous les projecteurs, ces initiatives contribuent à corriger les déséquilibres historiques.

« En général, je ne suis pas en faveur [des initiatives axées sur les femmes], mais nous en avons besoin en ce moment », affirme Sophie Forest. Il y en a eu pour diverses communautés sous-représentées, pas seulement pour les femmes, et je suis totalement d'accord avec cela. Cela dit, je ne crois pas qu'il faille soutenir un écosystème ici, au Canada, où des femmes qui ne réussissent pas à se qualifier obtiennent du financement simplement parce qu'elles sont des femmes. »

À long terme, tout porte à croire que les fondatrices d'entreprises technologiques bénéficieront d'une plus grande équité, car la communauté des bailleurs de fonds et la société dans son ensemble font de la diversité une priorité.

« De plus en plus de femmes deviennent des chefs de file des communautés de l'investissement et des entreprises en démarrage », ajoute Katie Kaplan. « C'est effectivement un processus qui peut prendre un certain temps, mais j'ai déjà constaté des améliorations, et je pense que nous en verrons de plus en plus à mesure que nous poursuivrons sur cette voie. »

Pour en savoir plus sur la façon dont l'équipe des technologies émergentes de BDO peut aider votre entreprise:

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