skip to content

Entrée en bourse par l’entremise d’une SAVS :

Incidences sur la présentation de l’information financière

Article

Deux annonces ont capté l'attention à la mi-avril à propos des hauts et des bas des sociétés d'acquisition à vocation spécifique (SAVS), mécanisme lié au marché boursier très en vogue.

Tout d'abord, la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis a révisé ses directives sur la présentation de l'information financière. À la suite de ce changement, les bons de souscription de SAVS assortis de certaines modalités doivent être classés dans les passifs plutôt que dans les titres de capitaux propres, ce qui pourrait calmer le marché des SAVS. C'était le lundi 12 avril.

Le lendemain, la plus importante évaluation d'une transaction de SAVS de l'histoire a été enregistrée. Grab, multinationale établie à Singapour, a fusionné avec une SAVS soutenue par Altimeter Capital. Grab est l'équivalent d'Uber en Asie du Sud-Est, mais elle est encore plus importante et diversifiée. La société serait évaluée à près de 39,6 milliards de dollars américains.

Ces deux événements sont liés à l'une des stratégies de sortie ou de financement les plus attrayantes depuis des années. Toutefois, comme l'indiquent les directives de la SEC, les SAVS soulèvent des enjeux qui leur sont propres en matière de présentation de l'information financière. Examinons l'espace particulier qu'occupent les SAVS sur les marchés financiers et les changements comptables que les sociétés doivent s'attendre à appliquer lorsqu'elles fusionnent avec une SAVS.

Qu'est-ce qu'une SAVS?

Une SAVS, ou « société d'acquisition à vocation spécifique », est un moyen de s'inscrire à la cote.

Bien qu'elles existent depuis des décennies, les SAVS se sont multipliées au cours des dernières années et leur nombre a explosé en 2020. Les SAVS ont permis de recueillir plus de 83 milliards de dollars américains l'an dernier et ont déjà dépassé ce sommet en 2021, bien que leur nombre ait chuté en avril.

Les SAVS ont surtout connu un essor aux États-Unis, ce qui ajoute une étape supplémentaire en matière de comptabilité transfrontalière pour les sociétés canadiennes.

Il n'est pas simplement question d'une inscription à la cote d'une bourse », indique le chef national des Services-conseils en comptabilité de BDO, Armand Capisciolto. « Vous devez adopter un cadre d'information financière totalement différent. Les sociétés privées canadiennes qui ont été approchées par des SAVS américaines doivent retraiter leur information financière, et elles doivent le faire rapidement.

Comment fonctionne une SAVS?

Les SAVS comportent un processus en deux étapes :

  1. Création d'une SAVS
    Une société s'inscrit à la cote d'une bourse en effectuant un premier appel public à l'épargne (PAPE). Cette coquille vide est constituée dans un seul objectif : mobiliser des capitaux dans le but d'acquérir une autre société. Les investisseurs d'une SAVS, aussi appelés « promoteurs », comptent sur la direction pour trouver des sociétés de qualité. Comme personne ne connaît l'identité de la société cible lors de la création d'une SAVS, ce type d'entreprise est souvent appelé « société de chèque en blanc ».
  2. Fusion avec une SAVS 
    Les promoteurs de la SAVS ciblent une société à acquérir. Si les propriétaires de la société cible et les actionnaires de la SAVS conviennent de l'opération, la société cible fusionne avec la SAVS. Comme la SAVS est déjà une société cotée en bourse, la société cible devient également inscrite à la cote au moyen d'une prise de contrôle inversée. Il s'agit alors d'une opération d'acquisition par une SAVS (de SPAC, transaction en anglais). Si les promoteurs de la SAVS ne réalisent pas la transaction dans un horizon de deux ans, ils doivent liquider la SAVS et retourner les fonds aux investisseurs.

Sociétés cibles : avantages d'une SAVS

Pour les sociétés cibles et leurs fondateurs, la fusion avec une SAVS permet d'accéder facilement aux marchés financiers. C'est particulièrement vrai pour les petites et moyennes entreprises, qui n'ont pas nécessairement le profil idéal pour procéder à un PAPE. Par ailleurs, les évaluations sont souvent supérieures lorsque l'entreprise fusionne avec une SAVS plutôt que lorsqu'elle procède à un PAPE traditionnel ou à un placement privé.

Les fusions avec des SAVS sont aussi réalisées plus rapidement, soit en quelques mois plutôt qu'en quelques années pour un PAPE. Il n'est pas nécessaire de séduire les investisseurs, car la SAVS est déjà inscrite en bourse. Par ailleurs, la présentation de l'information financière peut être plus simple que pour un PAPE traditionnel. Par exemple, la société cible doit déposer un document S-4 auprès de la SEC plutôt qu'un document S-1, dont les coûts sont plus élevés.

PAPE par voie expresse, mais sans raccourci en matière de présentation de l'information financière

La réputation des SAVS, selon laquelle elles seraient une voie plus facile à emprunter pour entrer en bourse qu'un PAPE, a alimenté ce que plusieurs qualifient de bulle des SAVS. La SEC a pourtant fait une mise en garde l'an dernier pour indiquer que les sociétés ne doivent pas s'attendre à bénéficier d'un raccourci au titre de la réglementation. La fusion avec une SAVS américaine signifie qu'il est nécessaire de respecter la réglementation de la SEC tant avant qu'après la fusion.

Pour fusionner avec une SAVS, les sociétés cibles canadiennes doivent apporter trois ajustements à leur comptabilisation :

  1. Changer de référentiel comptable en adoptant les PCGR américains plutôt que les Normes internationales d'information financière (IFRS) ou les Normes comptables pour les entreprises à capital fermé (NCECF). De nombreuses sociétés qui fusionnent avec une SAVS ont déjà obtenu du financement par capital-investissement. Le changement de référentiel comptable ajoute une certaine complexité.
  2. Retraiter leur information financière pour refléter leur nouveau statut de société ouverte. Les sociétés cibles doivent fournir l'information nécessaire pour le dépôt effectué par la SAVS auprès de la SEC, notamment les états financiers historiques audités. Les audits doivent être retraités en vertu des PCGR américains et des normes d'audit du Public Company Accounting Oversight Board (PCAOB). À titre de sociétés ouvertes, les sociétés doivent également être préparées à faire l'objet d'une surveillance accrue à la suite de la fusion.
  3. Mettre à jour leurs processus et contrôles internes pour satisfaire aux exigences américaines relatives aux sociétés ouvertes. Les efforts de mise en œuvre peuvent nécessiter une évaluation des risques, l'embauche et la formation d'un plus grand nombre d'employés ainsi que la mise en place de nouveaux processus ou systèmes visant à soutenir l'information financière et la gestion opérationnelle.

Pour plusieurs petites et moyennes entreprises, l'introduction en bourse suppose un changement d'état d'esprit. De nombreuses organisations exercent leurs activités avec des équipes de services en comptabilité réduites et des systèmes comptables de base. Pour accélérer la fusion et simplifier l'audit, ces sociétés doivent préparer des documents pour le dépôt et des états financiers selon les PCGR américains. Ce sprint nécessite une grande part de l'attention des entreprises à court terme. Les sociétés ont généralement besoin d'un soutien externe pour réaliser le travail rapidement et de manière professionnelle.

Selon Armand Capisciolto, de BDO, « l'information financière de votre société est importante pour les investisseurs, et les SAVS ne font pas exception. Cela peut faire une réelle différence pour les sociétés cibles canadiennes ».

La bulle des SAVS a-t-elle éclaté?

Les directives de la SEC à propos des SAVS pourraient refroidir le marché en surchauffe. Les observateurs se demandaient déjà s'il existait suffisamment de sociétés de qualité correspondant aux intérêts des SAVS. Ils ont également formulé des commentaires en lien avec les nombreuses célébrités qui ont certes apporté aux SAVS un statut de vedette, mais bien peu de valeur stratégique.

Armand Capisciolto affirme pourtant que l'engouement pour les SAVS ne faiblit pas nécessairement.

« Il existe encore des centaines de SAVS à la recherche de sociétés cibles, affirme-t-il. À court ou à moyen terme, les SAVS demeureront l'une des options les plus emballantes pour les fondateurs canadiens qui cherchent une stratégie de sortie ou de financement. Les sociétés cibles peuvent avoir une longueur d'avance en mettant de l'ordre dans la présentation de leur information financière. »

Notre site utilise des témoins nous permettant de vous offrir un service plus réactif et personnalisé. En consultant notre site, vous acceptez l'utilisation des témoins. Veuillez lire notre déclaration de confidentialité pour en savoir plus sur les témoins que nous utilisons et sur la façon de les bloquer ou de les supprimer.

Accepter et fermer